Remarque

Ce format d’histoire multimédia utilise du contenu audio et vidéo. Veuillez vérifier que vos haut-parleurs sont allumés.

Utilisez la roulette de la souris ou les touches de direction de votre clavier pour parcourir les pages.

Balayer pour parcourir les pages.

Démarrer

Le pays de Nod, un entretien avec FC Bergman

Logo https://webdoc.toneelhuis.be/le-pays-de-nod-un-entretien-avec-fc-bergman

Le pays de Nod

Un entretien avec FC Bergman par Renan Benyamina
pour le Festival d'Avignon 2016
Accéder à la première page

Le musée comme un être humain

Accéder à la première page
RB: Comment est née l’idée de votre pièce Le pays de Nod ?

FC Bergman:
 Nos productions sont conçues pour les salles de théâtre mais aussi très souvent pour d’autres types de lieux. Lorsque nous avons commencé à travailler sur notre nouveau projet, nous savions, avant toute chose, qu’il s’agirait d’une pièce hors les murs. Nous voulions créer un spectacle fondé sur l’histoire d’un lieu.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                     
Accéder à la première page
À l’époque, le Musée des Beaux-Arts d’Anvers fermait ses portes pour une dizaine d’années dans le cadre d’un important chantier de rénovation. Ce musée est construit autour d’une salle extrêmement importante, qui en constitue véritablement le coeur : la salle dédiée à Peter Paul Rubens.

Certaines des quinze oeuvres qui s’y trouvent sont si grandes qu’elles ne peuvent pas quitter la salle : le cadre des portes est trop étroit. En janvier 2015, nous avons visité la salle en chantier : les toiles avaient été déplacées dans des réserves au sous-sol et la salle était véritablement démolie, en ruine. Cette visite a produit en nous une sensation très étrange.
Accéder à la première page
Nous entretenons en effet – comme la plupart des Anversois – une relation très intime avec le musée et avec la salle Rubens. Cette salle est le symbole de la permanence et de la résistance face au temps et aux épreuves. Cela nous a beaucoup inspirés. Nous avons imaginé le musée comme un être humain, avec sa vie propre, connaissant des périodes florissantes, mais aussi confronté au processus de vieillissement et à la mort. L’espace nous est apparu comme un corps blessé, fragilisé.

Accéder à la première page

12 mètres x 12 mètres x 24 mètres

Accéder à la première page
RB: Qu’est-ce qui a motivé la reproduction à l’identique de cette salle ?

FC Bergman
: En travaillant sur l’histoire du musée, nous avons trouvé des images de la seconde guerre mondiale ; une bombe V2 l’avait en partie détruit et sur une photographie, on voit la pluie tomber dans la salle Rubens. Cette image est entrée en résonance avec la vision du musée en chantier.

Nous avons d’abord souhaité créer et présenter notre spectacle in situ, dans la salle en travaux. Mais au terme de longs débats, cela s’est avéré impossible. Pour des raisons de sécurité autant que de principe. 

Nous avons donc décidé de réaliser une copie de cette salle.

Accéder à la première page
Cette idée folle née d’une impossibilité s’est révélée une aubaine, une véritable opportunité. La copie permet en
effet une distance propice pour réfléchir à l’original. Cela nous a également offert des possibilités techniques impensables au sein du musée.

Nous avons recréé cette salle comme une arche, en bois, dont il suffit de franchir le seuil pour pénétrer dans le musée. On s’y trouve comme dans un refuge, une boîte à 360°, de douze mètres de hauteur et de largeur sur 24 mètres de longueur.
Accéder à la première page

Une fiction nécessaire

Accéder à la première page
RB: Vous évoquez une arche ; s’agit-il plus précisément pour vous d’une arche de Noé ?
                               
FCB: Oui, absolument. Nous considérons que cette salle est un espace de silence où l’être humain peut trouver du réconfort, de la protection contre le monde extérieur, où le temps s’arrête.

Toutefois, cet espace de silence subit la pression du monde extérieur. Cet espace permet de penser la culture comme refuge mais aussi comme lieu cerné, subissant de nombreuses pressions. Ce bâtiment et les idées qu’il renferme semblent résister à tous les assauts. Le refuge est impossible car le monde extérieur finit toujours par entrer. Il n’est pas imperméable.
Accéder à la première page
La vie se réinvite toujours et l’on ne peut rester à l’écart du monde éternellement. Même si l’on veut s’en extraire, on est forcé de faire partie du monde.

La définition des lieux d’art et de culture comme des sanctuaires à l’abri des tourments du monde repose sur une fiction ; une belle fiction, nécessaire, à laquelle nous sommes attachés.
Accéder à la première page

Nous sommes tous en quelque sorte des Caïn

Accéder à la première page
RB: Le titre de votre spectacle, Le pays de Nod, renvoie également au registre du religieux.

FCB: Le pays de Nod est évoqué dans l’histoire d’Abel et Caïn : c’est là que Caïn a été abandonné après avoir tué son frère Abel. Il s’agit d’un lieu sans but.

Pour nous, le pays de Nod est à l’extérieur de la salle du musée. Nous sommes tous en quelque sorte des Caïn, condamnés à vivre au pays de Nod mais nous pouvons trouver refuge. Le pays de Nod essaie de pénétrer la boîte, cet espace de silence et de paix. Nous ne pouvons pas y échapper, peut-être parce qu’il est en réalité à l’intérieur de nos esprits.
Accéder à la première page
La religion est un élément très présent dans notre travail ; nous avons grandi dans la culture chrétienne, c’est dans nos corps et nos âmes.

Nous ne sommes pas des personnes religieuses mais la religion est partout en nous, dans la société et dans les arts. Nous plaçons le religieux à l’extérieur des murs de notre espace et en même temps, il y a ce grand Christ de Rubens qui nous toise, qui observe avec une certaine gravité ce qui se déroule sous ses yeux.
Accéder à la première page

Des histoires nuancées plutôt que des traités sur l’actualité politique

Accéder à la première page
RB: Vous définissez la salle Rubens comme un refuge. L’actualité de la crise des réfugiés vous a-t-elle
inspirés ?

FCB: Bien entendu, l’actualité nous inspire, mais nous ne cherchons en aucun cas à produire une déclaration politique, un discours. Notre spectacle y fait inévitablement référence, et nous l’assumons, mais nous essayons toujours de raconter des histoires universelles. Nous considérons que le contexte dans lequel un spectacle est joué lui donne une signification spécifique, au-dessus et au-delà de l’histoire initiale. Nous avons joué 300 el x 50 el x 30 el à Athènes en 2011; à ce moment-là, tout le monde a vu ce spectacle comme une métaphore de la crise grecque.

Notre objectif est de créer des récits interprétables de différentes manières, comme les oeuvres ouvertes décrites
par Umberto Eco. Nous essayons de raconter des histoires nuancées plutôt que des traités sur l’actualité politique.
Accéder à la première page

La fragilité de l’être humain

Accéder à la première page
RB: Les rapports d’échelle subjugants sont au coeur de votre démarche artistique. Que vous permet la démesure ?

FCB: Il s’agit d’une exigence formelle, indissociable pour nous du contenu. Nous racontons des histoires avec des
formes, des images et parfois avec le langage. Le jeu sur les rapports d’échelle nous permet de produire des images signifiantes et marquantes. C’est très important dans notre relation au public.

Mark Rothko déclarait produire des formats très grands afin que le spectateur puisse s’y perdre et naviguer dans l’oeuvre. En immergeant le public dans l’oeuvre plutôt qu'en le plaçant en face d’elle, c’est l’effet que nous recherchons.
Accéder à la première page
L’immensité du décor rend les hommes très vulnérables, humbles. La fragilité de l’être humain, confronté aux éléments qui le dépassent, nous intéresse beaucoup.

Les effets techniques, la dimension grandiose permettent de traduire la grandeur des éléments et de montrer la beauté d’un homme qui essaie de se battre mais qui n’y parvient pas. Les spectateurs qui entrent dans la boîte, eux aussi, deviennent petits. Dans ce rapport d’échelle, l’histoire est déjà en partie racontée.
Accéder à la première page

Un processus ouvert et intuitif

Accéder à la première page
Accéder à la première page
RB: À partir de quels inspirations et matériaux avez-vous construit la dramaturgie du spectacle ?

FCB: Nous travaillons avant tout à partir d’une pensée, puis nous collectons des images. Dans les journaux, dans les films, un peu partout ; il s’agit d’un processus très ouvert et intuitif. Le cinéma et les arts plastiques nous inspirent davantage que le théâtre lui-même. Nous aimons mixer les genres et les disciplines.

Nos spectacles ont à voir avec des installations, qui ont une durée définie. Au moment d’entrer dans la salle du Pays de Nod, les spectateurs découvrent un cartel indiquant qu’il s’agit de la salle Rubens ; la boîte est une pièce d’art en soi.
Accéder à la première page
Pour ce spectacle, nous avons été très inspirés par l’oeuvre de Godard. En particulier par une scène, dans Bande à part, où un homme court à travers le musée du Louvre avant que d’autres ne l’imitent.

Cette scène est parfaitement iconique et célèbre un rapport très libre à l’espace. Nous avons visionné dans la foulée de nombreux films de Godard ; cela a été une révélation. Chez lui, l’intrigue n’est pas centrale, les rebondissements ne constituent pas l’ossature de l’histoire. C’est également le cas dans notre travail. Nous nous sommes aussi reconnus dans la manière très peu psychologique qu’ont les acteurs de jouer chez ce réalisateur.
Accéder à la première page

Le pays de Nod, une expérience

Accéder à la première page
RB: Malgré cette référence à Godard, Le pays de Nod est un spectacle sans paroles. Que s’y trame-t-il ?

FCB: Il y a six personnages : les deux gardiens de musée, les trois visiteurs, officiellement inspirés de Bande à Part, et
le conservateur, le personnage principal. Il a la tâche d’évacuer les oeuvres mais ne parvient pas à sortir la seule qui est encore accrochée, Le Coup de Lance.
Accéder à la première page
Les visiteurs arpentent une salle sans oeuvre, le conservateur est dans l’incapacité d’accomplir sa tâche, les gardiens ne gardent plus rien. Il y a une dimension absurde forte dans
cette galerie de portraits. L’espace apparaît d’abord comme un lieu très concret – une salle de musée – et se transforme peu à peu en espace métaphorique.

L’histoire n’est pas une histoire chronologique et ne repose sur
aucune unité de temps. Tout ce qui s’y déroule peut se dérouler à des époques différentes. Nous pourrions définir
nos spectacles comme des oeuvres d’atmosphère.
Accéder à la première page
Nous proposons une expérience à laquelle les spectateurs
prennent part, où il ne s’agit pas de comprendre les ressorts d’un récit mais d’éprouver une histoire sensible.

-
Propos recueillis par Renan Benyamina
Accéder à la première page

Bandes-annonces

Accéder à la première page
Fermer
Je suis d'accord pour que l'on montre des vidéos Vimeo. Plus d'informations

Pour ne pas afficher les éléments externes, modifiez vos paramètres ici.

Accéder à la première page
Fermer
Je suis d'accord pour que l'on montre des vidéos Vimeo. Plus d'informations

Pour ne pas afficher les éléments externes, modifiez vos paramètres ici.

Accéder à la première page
Fermer
Je suis d'accord pour que l'on montre des vidéos Vimeo. Plus d'informations

Pour ne pas afficher les éléments externes, modifiez vos paramètres ici.

Accéder à la première page
Fermer
Je suis d'accord pour que l'on montre des vidéos Vimeo. Plus d'informations

Pour ne pas afficher les éléments externes, modifiez vos paramètres ici.

Accéder à la première page
Faire défiler pour continuer Glissez pour continuer
Balayer pour continuer
Fermer
Aperçu
Faire défiler vers la gauche
Chapitre 1 Le pays de Nod

Le pays de Nod

Chapitre 2 Le musée comme un être humain

Le musée comme un être humain

Chapitre 3 12 mètres x 12 mètres x 24 mètres

12 mètres x 12 mètres x 24 mètres

Chapitre 4 Une fiction nécessaire

Une fiction nécessaire

Chapitre 5 Nous sommes tous en quelque sorte des Caïn

Nous sommes tous en quelque sorte des Caïn

Chapitre 6 Des histoires nuancées plutôt que des traités sur l’actualité politique

Des histoires nuancées plutôt que des traités sur l’actualité politique

Chapitre 7 La fragilité de l’être humain

La fragilité de l’être humain

Chapitre 8 Un processus ouvert et intuitif

Un processus ouvert et intuitif

Chapitre 9 Le pays de Nod, une expérience

Le pays de Nod, une expérience

Faire défiler vers la droite